Fred Solojak

Fred Solojak

Merci à ma mère...

 

 

Ma Mère, sais-tu encore qui je suis,

Toi qui es morte de la maladie de l’oubli ?

Sur le cercueil de bois cuivré,

Je trace les lettres de ton prénom

Et, comme lui aussi tu l’as égaré,

Afin de ne point te faire offense,

Si c’est au mot « Amour » que je pense,

C’est « toujours » que j’écris...

 

Devant le tertre de terre sur lequel tu es déposée,

Dans l’attente du plongeon vers le ciel,

Je m’agenouille, je ferme les yeux, je te revois,

Attentive à la fleur qui se courbe,

À l’oiseau qui s’envole, à l’enfant qui s’en va...

 

Tu n’es plus de ce monde, toi qui en fut l’essentiel,

Mais quand je songe à ce jour de printemps

Qui te fit chuter dans la tombe,

C’est par un cri d’enfance que je te fais revenir,

Pour un instant, un instant à toi et à moi,

Afin qu’en un seul « Comment vas-tu ? »,

Je te délivre tous ces « pardons » pertinents

Pour avoir été le fils insolent que je fus si souvent...

 

« J’aurais eu encore tant de choses à te dire »...

Voilà la phrase que chacun d’entre nous pourrait écrire,

En imparable épitaphe sur les cercueils de bois cuivré

Qui emportent les mamans vers les étoiles,

À la rencontre de qui ? Dieu seul le sait...

 

Dieu t’aimait si fort qu’Il t’a fait un cadeau sublime,

Celui de te faire ignorer que tu quittais cette terre

Pour le rejoindre là où Il est, dans l’accueil ultime,

Au jardin promis où germe le Grand Mystère...

 

Aussi merci, mon Père, d’avoir fait mourir ma mère

Sans qu’elle ne verse une seule larme,

N’exprime un seul soupir, un seul adieu.

Elle avait oublié jusqu’à mon nom

Et, pourtant, elle attendait dans le silence,

Dans la poussière de la chambre,

Parmi les débris de sa mémoire,

Que j’arrive —moi ou un autre,

Afin de lui dire « au revoir »...

 

Elle attendait comme on attend l’aube,

En dormant la tête creuse,

Le cœur battant encore,

La porte qui s’ouvre sur l’ange...

 

Il la prend et l’emmène,

Me laissant seul et soulagé

De tous ces « je t’aime »

Que je n’ai plus à délivrer

À cette mère déjà morte

Avant que d'avoir expiré...

 



06/08/2012
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